samedi 24 octobre 2009

Je peux avoir ma chemise ?

 

L'enfant entre dans le bureau et demande "je peux avoir ma chemise ?". C'est presque un rituel, maintenant, cette entrée en matière et cette demande. Et comme il en a maintenant l'habitude, il continue son dessin. Au début, c'était juste le plan de sa classe "comme ça tu va voir ou est ma place", et puis le plan a débordé : dans la cour de récré, dans les couloirs, dans la rue en face de l'école. Il a suivi, semaine après semaine, le trajet école - maison. Le thérapeute a regardé tout cela, avec plaisir au début - une histoire de place, on y reconnaît ses petits - puis avec quelques inquiétudes - qu'est-ce qui va contenir ce dessin qui déborde d'une feuille à l'autre ? Il a été tenté d'interpréter, mais l'enfant ne lui laissait pas... la place ! Si les feuilles se couvrent d'un trajet, la séance ne désemplit pas de sa voix "et puis tu vois, là, il faut tourner ici, et là il y a un trottoir comme ça..." Et interpréter sur quoi ? La chemise ? La place ? Ce qu'il ressent comme invasion ? Et en quoi cela aiderait l'enfant ? Et puis, l'enfant a trouvé sa place dans la thérapie. Et le thérapeute aussi. Un jour, l'enfant a eu une demande différente :"Je peux voir mes anciens dessins ?" Il les regarde gravement, les commente, n'en reconnaît pas certains. Le thérapeute demande :

- Te souviens tu, comme tu parlais beaucoup et vite alors ?

- Ah ça oui !

- Je me demandais pourquoi

- J'avais peur